a pink piggy bank wearing a face mask

On croit souvent que la différence entre les riches et les pauvres, c’est la quantité d’argent gagnée. Mais avant de parler de revenus (qui est un peu le critère facile), il faut aussi s’intéresser à ce que font ces gens de leur argent. Parce qu’avant tout, c’est le mindset et la discipline autour du sujet de l’argent qui te feront changer de catégorie dans ton activité. Voici donc une sélection de principes compris et construits après presque 15 ans d’entrepreneuriat. Principes qui m’ont fait tenir en indépendant, en studio, en agence (avec 7 bouches à nourrir) et aujourd’hui encore en Freelance.

Pour commencer, rappelons que l’argent est un outil, qui te permet d’aller d’un point A à un point B. Ça, c’est sa fonction. Ensuite, et parce que nous sommes humains, il y a une couche émotionnelle liée à l’argent, qui lui donne une dimension tout autre. C’est cette couche émotionnelle qui te fait paniquer du manque, qui te fait penser à court terme, ou qui te fait prendre de mauvaises décisions.

Dans l’entrepreneuriat, la discipline financière est au moins toute aussi importante que la capacité à trouver des clients et à vendre. Parce que si tu remplis les caisses mais que ta boîte n’est qu’un panier percé… bah plus tu rempliras, et plus fortes seront les fuites.

Principes de base

Avant de commencer ce top 5, rappelons quelques principes de base :

  • Les finances professionnelles ne sont pas les finances personnelles.
    Les gérer de la même manière est une erreur tactique ET technique.
  • Que tu sois en société (EURL, SASU) ou en Auto-Entreprise, tu es une entreprise.
    Être capable de faire ce switch entre « moi » et « l’activité » est indispensable.

Maintenant que la base est posée, voici donc mes 5 principes intemporels, issus de 15 ans d’expérience.

Les 5 commandements de la finance, pour les Freelances

1. Le calcul et le suivi des finances de ton entreprise, tu feras.

Charges fixes, variables, salaires, cotisations, fond de roulement mensuel/annuel, objectifs de marge, investissements, extras, temps réels d’activité annuelle… tout doit être identifié, estimé, et condensé dans un même document qui te permets de savoir quand est-ce que tu paies tes frais de structure, quand est-ce que tu gagnes de l’argent, quels objectifs tu as pour chaque mois et où tu en es dans la progression vers ces objectifs.

J’ai d’ailleurs fait un webinaire complet sur le sujet (avec un tableau prêt à l’emploi), que je t’invites à découvrir.

Pilotage financier de son activité Freelance : le tableau de suivi

2. Ce dont tu as besoin, tu achèteras. Pour le reste, tu te maîtriseras.

Non, tu n’as pas besoin d’un setup de streamer de l’espace. Double écran 12.000 pouces, re-double écran avec l’iPad, clavier mécanique dernier cri, Macbook Pro avec une configuration de la NASA alors que tu ne fais que du Figma…

Réfléchis avant d’acheter et maîtrise tes émotions. Fais les tri entre tes besoins réels et tes kifs. Ça ne veut pas dire que tu ne pourras jamais te faire plaisir, ça veut juste dire « chaque chose en son temps ». Alors libères-toi des collègues ou influenceurs qui s’équipent comme des dingues mais ne travaillent pas, et concentre toi sur ce qui t’es utile pour décrocher des clients et mener tes missions à leur terme.

3. Plusieurs comptes en banque, tu ouvriras.

C’est LE tips sous côté. Trop souvent, les Freelances n’anticipent pas les dépenses récurrentes et prévisibles et se retrouvent à se plaindre sur LinkedIn pour jouer les victimes (comment tu peux te plaindre de l’URSSAF alors que les taux et les calendriers sont clairement connus et annoncés ?!).

Mon conseil est simple : ouvre un second compte en banque « d’anticipation » (un second compte pro sans carte, ou un compte épargne gratuit si tu es auto-entrepreneur). Sur ce compte :

  • Quand tu te verses un salaire, tu verses immédiatement les cotisations liées.
    Si tu ne peux pas payer le total « salaire + cotisations », tu baisses ton salaire, et basta. Discipline.
  • Quand tu encaisses une facture (si tu factures la TVA) sur ton compte principal, dépose immédiatement la TVA collectée sur ce compte.
    Si tu as des gros montants de TVA à déduire grâce à des achats, fais une régularisation entre ce compte d’anticipation et ton compte principal. Si les montant sont petits, ne fais rien : ça constituera un début de réserve pour l’impôt sur les sociétés.
  • Lorsque tu paies la CFE, tu en connais le montant. Sinon, tu demandes aux impôts ou à ton comptable (et pas à LinkedIn). Et tu provisionnes tous les mois sur ce second compte.
  • Last but not least : branche les impôts et l’URSSAF sur ce compte, pour collecter la TVA, la CFE, ainsi que tes cotisations.

Si tu es discipliné•e, tu n’auras même plus à te soucier de ces parasites.
Tu éviteras même le ridicule si tu es du style à te plaindre sur LinkedIn.

4. Les mois mous, tu anticiperas.

Toutes les entreprises ont des mois avec et des mois sans. Des mois où tu te fais déglinguer par les demandes, et des mois où tu te tournes les pouces en te demandant quel sesn à ta vie.

Deux cas de figure se présentent :

  • Tu démarres ton activité :
    travailles tes chiffres (1er commandement), et mets au 3 mois de fond de roulement de côté. Au fur et à mesure des années, passe au point suivant.
  • Ton business a déjà plusieurs années :
    analyse les 3-4 dernières années de ton activité, identifies les périodes pleines et moles qui se répètent (tu peux te référer au CA facturé par exemple, ou à ta propre analyse de ton business), et mets de côté le fond de roulement nécessaire pour ces mois mous (avec des versements de réserve tous les mois par exemple, ou un pourcentage de chaque facture encaissée).

Et pour celles et ceux qui suivent au fond de la salle : oui, cette anticipation des « mois mous » peut justifier l’ouverture d’un 3ème compte bancaire.

5. Des stratégies de paiement constructives, tu imagineras.

Maîtriser son argent, ce n’est pas juste avoir la main sur ce qui est sur ses comptes. C’est aussi optimiser la manière dont l’argent arrive sur tes comptes, lorsqu’un projet est signé.

À mes débuts (les 7-8 premières années je dirais), je fonctionnais avec un acompte de 30%, et le solde à la livraison du projet. Ensuite, j’ai commencé à fonctionner avec un acompte de 30%, une situation de 30% à mi-projet, puis le solde à la livraison. Mais ça ne résolvais toujours pas les montagnes russes de ma trésorerie. Et lorsque j’ai appris que ce n’était pas pratique pour mes clients non plus (leur trésorerie n’aimait pas non plus les gros montants qui sortaient une fois de temps en temps), je me suis dit qu’on pourrait bien trouver un fonctionnement qui arrangerait les trésoreries de tout le monde.

Aujourd’hui, avant de penser « acompte-situation-solde », je pense à combien de temps le projet va durer (une estimation suffit). Je propose ensuite la mensualisation du paiement du projet. J’ai aussi mis en place des intervalles de budgets, pour lesquels je demande du paiement en avance ou non, mensualisés ou non.

Par exemple :

  • Budget < 2000 € HT : paiement comptant à la commande
  • 2000 € HT < budget < 4000 € HT : 50% d’acompte
  • > 4000 € HT : 30% d’acompte + mensualisation

Et voici un exemple concret de mensualisation des paiements :
Pour un projet estimé à 6 mois (estimation liée au planning client et à mon expérience), je propose 30% d’acompte (pour le mois 1), puis 70% découpés en 5 mois restants, soit des situations mensuelles de 14%.

Et franchement, depuis les années que je pratique cela, aucun client n’y a trouvé à redire. Ma trésorerie elle, ne s’en porte que mieux.

Bonus « France » : sans les aides, tu planifieras.

Une des maladies des Freelances français, ce sont les aides. L’ACRE pour la première année d’activité, la dispense temporaire de CFE… autant d’aide qui permettent aux indépendant•es de se lancer, mais qui peuvent se transformer en piège.

Bah oui, parce qu’en réalité, tout cet argent « économisé » est en fait dépensé. Super.
Puis, lorsque les aides ne sont plus là, on retourne sur LinkedIn pour crier à l’injustice (et passer pour un amateur, sans s’en rendre compte).

Du coup, la solution est simple : gères tous tes prévisionnels sans prendre en compte les différentes aides que tu peux toucher.

  • Parce que les aides, c’est temporaire.
    Et si la santé de ton business repose sur les aides, c’est un très mauvais signe.
  • Parce que les aides, c’est du bonus.
    Ça ne constitue pas le socle financier « normal » de ton entreprise, et ça ne remplacera jamais le fait que tu dois trouver des clients.
  • Tu perçois l’ACRE ?
    Provisionne tout le même les cotisations URSSAF liées à ta rémunération.
  • Tu ne paies pas encore la CFE ?
    Épargne la tout de suite au lieu de la dépenser pour cet iPad que tu n’utiliseras pas vraiment. Ou si tu la dépenses, fais le pour quelque chose d’utile à ton business : un investissement qui fait avancer ton entreprise (formation par exemple).

Planification et discipline :
un faible coût pour garantir la santé de ton activité et éviter les mauvaises surprises. Non ?

Quoi retenir ?

  • Gérer l’argent de son entreprise, c’est gérer la santé de son entreprise (et de fait, celles de ses revenus).
  • L’argent n’a pas d’émotions. Mais nos émotions peuvent nous pousser à faire de très mauvais choix en termes d’argent. Visualise et maîtrise tes émotions face à l’argent.
  • Gérer la santé financière de son entreprise, ça ne se fait pas à coup de « petits gestes ». Ça se fait en pratiquant la discipline.

Piloter les finances de son activité Freelance